Le rapatriement du corps à Antisanti.
À la demande de la famille, durant l'automne 1904, le corps du
Lieutenant-colonel Lucciardi est rapatrié en Corse et enterré à Antisanti.
La Revue de Madagascar, dans son numéro de novembre 1904, décrit le
déroulement des cérémonies funèbres qui accompagnent l'exhumation (1) :
Les restes du lieutenant-colonel Lucciardi, que la famille du
regretté chef d'état-major avait désiré faire revenir au pays natal, ont été
exhumés à Tananarive et sont arrivés à Tamatave le 17 septembre. Le lieutenant-colonel
Grosjean, commandant d'armes, ainsi que plusieurs fonctionnaires, amis personnels et
compatriotes du défunt, s'étaient rendus à la rencontre du convoi à
Ivondro. A
Tamatave le corps a été disposé dans une chapelle ardente aménagée au bord de la
plage, qu'ont visitée pendant toute la journée du 18 de nombreuses personnes tenant à
payer un dernier hommage à la mémoire du défunt. Le général Gallieni, accompagné de
ses officiers d'ordonnance, est venu dans l'après-midi déposer une couronne en fleurs
naturelles sur le cercueil. D'autres couronnes ont été également apportées, notamment
par une délégation des Corses habitant Tamatave. Le lendemain 19, à neuf heures et
demie du matin, le corps a été embarqué sur le Melbourne, à destination de Marseille.
Il est accompagné par M. le docteur Tédeschi, qui le conduira jusqu'au pays natal du
défunt à Antisanti et le remettra à la famille. Le Gouverneur général a prié M. le
colonel Drude, commandant le 163e régiment d'infanterie à Ajaccio, de le représenter à
la cérémonie de l'inhumation définitive.
À
Antisanti, la cérémonie se déroule devant tout les habitants du village et du canton de
Vezzani réunis et les amis de la famille venus de toute la Corse.
Le Colonel Drude, commandant le 163e régiment d'infanterie à Ajaccio,
représente le Général Gallieni et rendant à la Corse un de ses plus glorieux
enfants, renouvelle les condoléances du Général et apporte l'écho
ému de son affection, de son chagrin, de sa douleur.
Plusieurs orateurs se succèdent alors, qui pour citer les hauts faits
d'armes de Lucciardi, qui encore comme M. Lucciani, professeur au collège d'Ajaccio, pour
rappeler les vertus du défunt :
Si ses hauts faits militaires lui avaient valu des honneurs et
un avancement rapides, ses vertus privées lui avaient attiré toutes les sympathies.
Modeste et généreux autant que savant et brave, il répandait autour de lui un parfum de
bonté qui lui gagnait les coeurs et des largesses qui n'avaient de limites que celles de
sa fortune. Nous avons encore présente cette physionomie si douce et si avenante qui
accueillait avec la même bienveillance le jeune homme et le vieillard, le riche et le
pauvre, l'ami et l'adversaire politique de sa famille, une des plus honorables du canton.
Pour cette âme d'élite, il n'y avait que des frères : elle ne connaissait point
ces divisions de parti qui séparent jusqu'aux parents que les liens étroits du sang
devraient tenir unis.
Ou bien encore, comme le lieutenant Giabicani qui, la voix brisée par
l'émotion, termine son discours par ces mots :
La Corse est fière d'avoir donné le jour à un si vaillant
soldat, et le passant, quel qu'il soit, n'aura qu'à jeter les yeux sur votre tombe pour
s'écrier :
" Ici repose un brave ! "
1 - Revue de Madagascar, 6ème année, N° 11,
novembre 1904
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