L'église d'Antisanti À la suite de la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905 et du décret du 29 décembre 1905 qui prévoit l'inventaire des biens des Églises afin de préparer la dévolution de ces biens aux associations cultuelles définies dans l'article 4 de la loi, des troubles surviennent en de multiples régions de France. Certains catholiques, avec à leur tête le curé de la paroisse, craignent que l’on pille leur église, et en plusieurs endroits l’armée et la gendarmerie doivent intervenir pour que les agents du fisc puissent réaliser l'inventaire.

En Corse, on signale que dés le 28 janvier des incidents se produisent à Bastia, puis à Ajaccio, le 6 et le 25 février, lors de l'inventaire des biens du Grand Séminaire, et encore au mois de mars à Orta, Livia, et Patrimonio (1).

On ne sait quelle attitude a été celle du desservant d'Antisanti, le curé Charles Mariani (2), ni celle du maire, Jean Toussaint Pieri, ni celle de leurs administrés. Alors que le premier espère une retraite bien méritée après 35 ans de sacerdoce, retraite qui lui sera attribuée avec effet rétroactif au 1er janvier 1906 par le décret du 19 octobre 1906, rendu sur le rapport du ministre de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes, et du ministre des finances (3), le second est en attente de sa réélection lors des élections municipales du mois de mai 1906.

Il est vrai que l'inventaire des biens de l'église d'Antisanti est réduit à sa plus simple expression : il n'y a pas d'objets de valeurs. Seuls sont concernés les meubles de l'église, des espèces en caisse pour un total de 100 f. et une terre, la parcelle Chioso alla Chiesa. Il n'y a rien de plus dans l'inventaire publié au Journal Officiel par le ministère de la justice et des cultes (4).

Le 15 janvier 1910, un décret présidentiel attribue une partie des biens de l'église d'Antisanti à la commune (5) :

Le Président de la République française, Sur le rapport du président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes,

Vu la proposition du préfet de la Corse, tendant à l'attribution des biens ayant appartenu à la fabrique de l'église d'Antisanti;

Vu la liste des biens ayant appartenu aux établissements publics du culte qui avaient leur siège dans le département de la Corse, ladite liste publiée au Journal officiel du 5 mai 1909 ; Vu les lois des 9 décembre 1905, 2 janvier 1907 et 13 avril 1908; Vu les décrets des 16 mars 1906 et 12 juillet 1909, ; Décrète :

Art. 1er. — Sont attribués à la commune d'Antisanti, à défaut de bureau de bienfaisance, les biens ayant appartenu à la fabrique de l'église d'Antisanti et actuellement placés sous séquestre, la présente attribution faite sous réserve des exceptions ci-dessous spécifiées et, en outre, sous la double condition : 1° d'affecter tous les revenus ou produits desdits biens au service des secours de bienfaisance; 2° d'exécuter les charges maintenues par la liste ci-dessus visée.

Art. 2. — Est excepté de la présente attribution le bien ci-après désigné : enclos dit de l'église, qui a fait retour à l'État.

Art. 3. - Le président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes, est chargé de l'exécution du présent décret.

Fait à Paris, le 15 janvier 1910.

 A. Fallières.

Par le Président de la République :
Le président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes,

Aristide Briand

La parcelle Chioso alla Chiesa, quant à elle, avait fait retour à l'État en date du 23 Avril 1909. Elle sera vendue aux enchères le 8 juin 1913 et achetée pour le compte de François Franchi, agent de police.

  1. Site Cronica di a Corsica.
  2. Il s'agit probablement d'Antoine Charles Mariani, fils de Xavier et de Marie Jeanne Leonelli, originaire de Morosaglia, étudiant au grand séminaire d'Ajaccio lors de son passage au conseil de révision en 1865.
  3. Journal officiel de la République française, n°290, 25 octobre 1906.
  4. Journal officiel de la République française, n°122, 5 mai 1909.
  5. Journal officiel de la République française, n°30, 31 janvier 1910.